" Mon père n’est qu’un mortel ! "
---------------------------------------------
Les flammes vacillantes du braséro projetaient les ombres des deux templiers sur les murs du donjon. Les deux soldats de quart étaient équipés de leur armure lourde comme il se doit pour un soldat de l'Inquisition en service. Mais, abandonnés contre un mur non loin, reposaient épées au fourreau, boucliers et heaumes, alors que les akkylaniens étaient penchés sur une petite table, complètement absorbé par la partie de dés qui risquait de voir disparaître leur solde.
Tapis dans les ombres, Conan souriait. Il lui avait été si simple de se faire passer pour un boucher livrant les cuisines de la forteresse de l'Inquisition. Les Lions et Griffons étaient tellement sûr de leur suprématie sur leur territoire respectif que pénétrer leurs places fortes était un jeu d'enfant pour le Keltois. C'est un pari lors d'une nuit de beuveries mémorables, qui avait poussé Conan à "visiter" un certain nombre de points stratégiques indispensables à la défense de la capitale barhanne, Kalienne. Encore un exploit que son père n'avait jamais réalisé.
Conan profita d'une dispute entre les deux gardes pour se faufiler derrière eux et rejoindre le couloir suivant. Il avait atteint les quartiers des inquisiteurs et son objectif… Le bruit de deux voix échangeant derrière la première porte l'informa que la pièce était occupée. Il écouta à la seconde. Des murmures psalmodiés lui indiquèrent la présence d'au moins un akkylannien à l'intérieur. La suivante fut la bonne. Aucun bruit. Avec précaution, Conan poussa la porte et pénétra dans la pièce. Une unique torche au mur éclairait la petite pièce qui semblait être les quartiers spartiates d'un inquisiteur. Parfait. Le barbare fit le tour de la pièce du regard. Une paillasse, un agenouilloir et une petite table avec son tabouret composaient le mobilier. Et dans un coin, l'armure lourde typique des inquisiteurs reposait sur un support, menaçante, même vide de son propriétaire. Sur le mur à son côté était suspendu une épée à deux mains. Source de la convoitise du keltois.
Alors que Conan s'emparait de la lame, un homme pénétra dans la pièce. Les réflexes du guerrier prirent alors le contrôle de son organisme. D'un puissant crochet du gauche à la tempe, il l'assomma et accompagna sa chute pour ne pas faire de bruit. Les akkylanniens ne valent pas grand-chose sans leur habit d'acier. En absence de bruit dans le couloir, il s'élança de son pas félin. En quelques enjambées silencieuses, il atteint la salle de garde pour tomber nez à nez avec l'un des Templiers en arme qui entamait sa ronde. L'akkylannien, en guerrier aguerri, chargea le keltois, son écu en avant en dégainant sa lame. Impossible pour Conan de relever le défi. Dommage… Mais il lui fallait quitter le donjon au plus vite, le cri d'alarme du garde réduisant fortement ses chances d'en sortir indemne. Alors que le l'akkylannien allait le bousculer de son bouclier, le pendentif du barbare émit une douce chaleur contre sa poitrine. Son pouls s'accéléra, le temps sembla ralentir. Il fit un pas de côté évitant la charge, et assena un violent coup de fourreau sur la nuque du soldat. Reprenant sa course, il entra le poste de garde, au moment où le deuxième templier rebroussait chemin pour l'intercepter. Prenant son butin à deux mains, il se projeta de toutes ses forces contre lui. L'épée volée en travers de la poitrine, l'akkylannien ne pouvait faire usage de ses bras, et sous l'effet de la charge, il recula de quelques pas… Chutant dans les escaliers derrière lui. Provoquant un vacarme d'enfer la chute emmena Conan et sa luge improvisée directement dans les cuisines, où toutes les activités s'étaient interrompues, le bruit approchant. Avec un grand sourire à l'attention des cuisiniers, Conan se releva, son adversaire trop sonné pour tenter quoique ce soit. Il traversa la cuisine, atteignit la petite cour arrière, et ralentissant le pas, s'empara d'une brouette pleine de détritus, et y camoufla rapidement la lame. S'avançant vers les portes de service, il croisa deux gardes qui rejoignaient les cuisines au pas de course. Ils ne remarquèrent même pas le keltois déplaçant son fardeau nauséabond. Le barbare franchit le portail. Une fois dans la rue, Conan sourit à nouveau. La lame de jugement à la main, il s'enfonça dans les ombres. Il était clairement temps de quitter Kallienne pour une période indéterminée...