Les trois cavaliers fendaient la nuit noire avec toute la célérité dont pouvait faire preuve leurs montures. Le choc des sabots sur la piste et la respiration des chevaux étaient les seuls sons qui brisaient la torpeur de cette nuit de pleine lune. Les bois étaient étrangement calmes. Un sifflement se fit entendre, sur la gauche de Yanis. Un mouvement attira alors son regard. Il vit un javelot de la taille d'un homme traverser Éloïse de part en part, laissant sa monture poursuivre sa course folle seule.
Avec une pensée triste pour la douce Éloïse, Yanis se reconcentra sur la piste devant lui.
" Nous devons atteindre l'orée du bois. " Pensa le messager." Coûte que coûte ! "
Se redressant sur sa selle, il talonna son cheval de plus belle. Les pauvres animaux avaient le regard fou, ils sentaient la tension de leur cavalier. Ils ne pourraient pas maintenir longtemps cette cadence infernale. L'écume déjà se formait sur leur échine. Il le fallait pourtant, l'ennemi était sur leurs talons.
Enfin, Yanis entrevit la plaine derrière la muraille d'arbres. Le soulagement emplit son cœur.
Émergeant du bois, le lion sentit la brise nocturne sécher la sueur perlant sur son visage. Ce doux courant d'air détendit fugacement le messager, évacuant une partie de la tension accumulée lors de la chevauchée. Les deux montures sentant leur cavalier se détendre, ralentirent sensiblement leur allure en quittant le couvert des arbres.
Surgissant alors derrière eux, un loup noir désarçonna Romhuald. Le jeune barhan projeté au sol par l'impact dégaina son épée et se redressa pour faire face. Tirant sur ses rennes, Yanis fit faire volte-face à son cheval, et chargea le suppôt d'Achéron. La lance du lion se brisa en s'enfonçant profondément dans la poitrine du Wolfen perverti, l'ouvrant en deux. Dégainant son épée, il s'avança pour l'achever. Dans un dernier élan, le loup agrippa Yanis déchirant son gambison, alors qu'il lui fendait le crâne d'un coup sec.
" A cheval ! " Lâcha Yanis
D'un bond, Romhuald remonta en selle, regardant en direction de son officier, il marqua une hésitation. Yanis reporta son attention vers l'orée du bois, une grande ombre menaçante en sortit lentement. Sa lance brisée, son armure déchirée ne présageaient rien de bon.
S'adressant à Romhuald, " Seule la missive compte ! "
Faisant face au loup, Yanis talonna son hongre alors que la bête s'élançait dans un grondement.