« Il n’est de vérité que la nôtre ! » (12/98)
« Comment ça, il a grandi et tué tous nos hommes ? » - Abel le Colérique. (10/02)
Abel sert l’empire d’Akkylannie depuis si longtemps, et avec tant de ferveur, qu’il ne peut imaginer la vie autrement que comme une succession de conflits. Il a vu tant de ses compagnons mourir et a subi tant d’horribles blessures que son âme a acquis la dureté et la froideur de l’acier. Il reste pourtant un combattant de foi et de cœur : peu d’hommes possèdent son talent pour rassembler les guerriers. Châtiment, son épée, symbolise le credo qui guide son existence : foi, fraternité et mission. (12/04)
Abel le Colérique acheva son adversaire en lui plantant sa longue épée dans le torse. Il jeta un regard autour de lui alors que le persécuteur expirait. A une trentaine de mètres, les templiers étaient aux prises avec trois monstrueux Formors. Les guerriers de Mérin combattaient avec une ardeur décuplée. un homme qu’il n’avait pas vu dans leurs rangs au début de la bataille était à leurs côtés et les exhortait à dépasser leurs limites. Abel s’interrogea un instant sur son identité, avant de se raviser. Le Temple avait ses mystères et mieux valait ne pas les dévoiler. (04/04)
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Nouvelle officielle Rackham :
Premières Armes.
Abel serrait sa lance tellement fort que ses phalanges commençaient à le faire souffrir. Depuis plusieurs minutes l'anxiété s'emparait de lui sans qu'il arrive à la maîtriser. Il avait mal au ventre, envie d'uriner, ce qui était rigoureusement impossible avec la lourde armure qu'il portait. “ Foi en Merin... ” se répétait-il en silence, comme si cette litanie pouvait contrer la peur. Autour de lui ses camarades ne semblaient guère plus rassurés : sur leurs visages imberbes - peu d'entre eux avaient dépassé les seize ans - se lisaient la fatigue et l'angoisse. Ils avaient marché plusieurs jours depuis leur casernement pour arriver jusqu'à cette plaine désolée à l'extrême nord de l'Empire d'Akkylannie. Ils attendaient depuis plus d'une heure, perplexes et inquiets ; le sergent qui commandait cette petite troupe de lanciers semblait plus doué pour aboyer des ordres que pour expliquer la raison de leur présence ici.
Pour presque tous ces jeunes soldats, c'était la première mission en extérieur, le premier affrontement réel. Abel se montrait plutôt doué à l'entraînement, mais jamais il n'avait eu un vrai adversaire en face de lui, jamais il n'avait dû blesser, encore moins tuer, un ennemi.
Machinalement son regard se porta vers les Templiers qui les avaient accompagnés pendant la marche des jours précédents. Les soldats du Temple se tenaient à l'écart, fiers et droits dans leurs armures étincelantes, la main posée sur la garde de leur épée bâtarde. Les Templiers semblaient si sûrs d'eux qu'à leur vue Abel sentit son courage revenir.
- “ En position ! ”
Le cri du sergent le surprit dans ses rêveries. Trop lentement Abel se coiffa de son casque. Il se mit en position de défense, lance en avant, bien campé sur ses jambes, mais avec un temps de retard sur ses compagnons. Le sergent avait surpris la lenteur de sa réaction et s’était avancé devant lui.
- “ Alors soldat on rêvasse ? ”
Avant même qu’Abel ait eu le temps de se justifier son supérieur l’attrapa par le col et l’envoya au sol.
- “ La première vertu du soldat c’est la discipline, j’entends qu’on m’obéisse au doigt et à l’œil ! ”
Pour appuyer ses paroles il asséna à Abel qui suffoquait à ses pieds un violent coup de pied.
- “ J’espère que je me suis bien fait comprendre soldat ! ”
Abel se releva en serrant les dents, s’efforçant de ne pas montrer la colère qui l’envahissait. Il bouillait de rage et avait de la peine à se contenir. Il parvint malgré tout à se calmer en se jurant intérieurement que personne ne l’humilierait jamais plus et que bientôt ce serait devant lui qu’on se soumettrait. Il reprit sa place dans le rang fort de cette certitude.
A l'horizon il n'y avait nulle trace d'ennemis, pas le moindre nuage de poussière qui aurait révélé des mouvements. Les soldats du Griffon restaient néanmoins sur leurs gardes. Le chef de l'expédition, un Commandeur Templier taciturne qui de tout le voyage n'avait pas eu un seul mot pour les jeunes lanciers semblait aux aguets.
Tout autour d'eux le sol sembla se mettre soudainement à trembler. L'Inquisiteur hurla quelques ordres mais il était trop tard : des bras, des corps aux chairs pourrissantes étaient en train de jaillir de terre, s'accrochant aux jambes des infortunés lanciers ou s'extrayant avec peine du sol. " Des zombies ! " songea avec horreur Abel, avant qu'une de ces créatures ne se jette sur lui. Il esquiva l'assaut lent et maladroit du Mort-Vivant et riposta d'un coup de lance. Sans prendre le temps d'achever son adversaire, Abel se dégagea et alla porter secours à ses camarades. Certains d'entre eux avaient déjà rejoint le cœur brûlant de Merin, d'autres, en mauvaise posture, se trouvaient aux prises avec deux ou trois adversaires. Il aperçut du coin de l'œil les Templiers qui écrasaient leurs adversaires avec l'efficacité d'une redoutable machine de guerre. Autour d'Abel c'était le chaos : en petits groupes, Morts-Vivants et soldats du Griffon s'affrontaient dans des luttes acharnées, alors que la terre continuait à vomir ses hordes impies.
Abel avait chaud, la poussière lui brûlait la gorge, la sueur lui coulait dans les yeux ; il frappait pourtant sans relâche, presque à l'aveuglette, touchant parfois mortellement ses ennemis. Sous son casque lui parvenaient les échos étouffés des combats, le bruit des armes qui s'entrechoquent, les râles des mourants, une cavalcade au loin. Le combat ne ressemblait pas du tout à ce que l'on pouvait apprendre à l'école militaire, il ne s'agissaient pas des manœuvres rigoureusement exécutées, des passes d'armes habilement enchaînées, mais le choc brutal des armes et des corps.
Abel aperçut avec un temps de retard l'imposant Centaure d'Achéron qui se dirigeait vers lui. L'effrayante créature le chargeait dans une course folle, lance pointée vers son cœur. Abel restait figé sur place ; la peur l'avait paralysé et il voyait comme dans un cauchemar le Mort-Vivant fondre sur lui. Dans un ultime sursaut il se protégea le torse de son bouclier et leva sa pique. Son écu dévia l'arme du Centaure qui vint le heurter violemment à la tête mais, juste avant de s'évanouir, il vit sa lance se planter dans le corps du monstre.
Il reprit conscience quelques minutes après. Les combats avaient cessé, il n'y avait plus aucun Mort-Vivant sur le champ de bataille mais plusieurs de ses camarades étaient morts. Abel avait mal au bras, et sentait le sang couler autour de son œil droit. Son arme lui avait été arrachée et gisait deux mètres plus loin dans le cadavre, inerte cette fois-ci, du Centaure. Sa tête lui tournait un peu, mais un bras secourable aida Abel à se relever. Il s’agissait d’un jeune sous-officier Templier. Indemne malgré les nombreuses traces de coups que portait son armure, il sourit au jeune lancier, puis, examinant sa blessure au front, il lâcha : " Tu garderas une vilaine cicatrice ". Puis il se pencha ensuite ramasser la lance d'Abel et la lui tendit
- " Tu t'es bien défendu aujourd'hui, c'est encourageant pour un premier combat. Mon nom est Arkhos, je saurai me souvenir de toi."
Abel masquait avec difficulté la grande fierté qui s’était emparée de lui. Alors qu’il rejoignait les siens, il aperçut au milieu des victimes du combat le cadavre du sergent. Il ne fit aucun effort pour cacher son sourire.